L'industrie culturelle du jeu vidéo représente un acteur important de nos sociétés post-industrielles, par son poids économique ainsi que par sa capacité de diffusion mondiale. De plus, les jeux vidéo forment un média politique, que cela soit revendiqué par leurs créateurs ou non : ils sont porteurs d'une vision du monde au travers de leur contenu ; de leurs mécaniques de jeu ; et de la forme même de leur médium.
Au sein de cette industrie culturelle, les thématiques historiques sont régulièrement exploitées depuis les années 90. L'Histoire a l'avantage de pouvoir remplir un rôle médiateur à deux titres : médiateur culturel, formant un ensemble de références communes basiques pour une grande partie du public mondialement visé ; et médiateur ludique, facilitant la tâche du game designer dans son contact avec le joueur en permettant de transmettre un ensemble de règles de jeu tacites liées au contexte historique exploité.
Cette utilisation vidéoludique de l'Histoire dans un média politique peut cependant être source de tensions, comme cela fut le cas lors de la campagne de promotion d'Assassin's Creed Unity en France. Il faut également garder à l'esprit que les jeux vidéo ne forment pas un corpus unifié et que chaque genre dispose de ses propres codes historiques, avec des constantes - goût pour la citation, mini-encyclopédies, protagonistes historiques réduits à l'état d'archétypes... - mais surtout des variantes. Celles-ci sont liées aux mécaniques de jeu, mais aussi à l'ampleur de la cible : à mesure que le public visé est grand, elles tendent vers une simplification et une anecdotisation de l'Histoire.
Les jeux vidéo ne peuvent cependant être ignorés par les historiens. En plus de marquer les mentalités de générations d'étudiants, ils sont aptes à offrir une nouvelle pédagogie de l'Histoire, grâce notamment à la "place à la table" qu'ils offrent au joueur via leur statut de simulation, recréant des événements du passé pour mieux les comprendre du point de vue des acteurs. Investis réellement par des historiens aujourd'hui situés en périphérie, ils pourraient devenir des outils de recherche et de transmission de savoir.
Mots-clés : Jeu vidéo, Histoire, Sciences sociales, Game studies, Digital humanities, Ludologie, Narratologie
L'intégralité du mémoire est disponible en ligne pour consultation ou téléchargement au format PDF : Quand l'Histoire est un jeu (texte complet).
Diplômé d'une Licence d'Histoire à l'Université Panthéon-Sorbonne, j'y ai notamment suivi les enseignements de Patrick Boucheron et de Joseph Morsel, dont la critique de l'objectivité de l'historien a constitué pour moi une source d'inspiration marquante.
Ayant dans le même temps appris la programmation informatique en auto-didacte, je me suis ensuite orienté vers le Master Cultures et Métiers du Web de l'Université Paris-Est, où a été soutenu ce mémoire. Mon souhait, dans lequel ce travail s'inscrit, est d'oeuvrer à un rapprochement des sciences humaines et des sciences numériques, que ce soit au travers de leurs outils ou de leurs thématiques.
Je suis également développeur web free-lance, game designer amateur, et ingénieur d'études à l'École des Hautes Études en Sciences Sociales.
Contact : irealcreation@gmail.com
Richard Legrand